Article posté par Ψvr2909.
Paru le mardi 29 juin 2010 à 12:24
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Des émancipations
Sous l'Ancien Régime (et de manière très morale, jusqu'au milieu du siècle dernier), la puissance du père était terrible.
Le jeune adulte, bien que majeur en âge, et même s'il gagnât correctement sa vie, ne pouvait administrer légitimement ses biens, pas plus qu'il n'avait le droit de vendre, ni d'acheter ou négocier, sans l'autorisation de son père. Se marier, qu'il eut ou non quitté l'ostal familiale, était impensable sans l'accord paternel.
Mais il n'était pas rare qu'un père émancipe son fils, dispense celui-ci de cette excessive obéissance.
De son bon vouloir, le chef de famille reconnaissait alors la rigidité de la loi, et affranchissait son fils du respect absolu. Généralement, la scène se déroulait de manière assez brève, selon un rituel défini, la transmission d'autorité s'effectuant à la façon de gestes précis, comme lors de l'émancipation de Jean Peyric, de l'Elzière.
Nous sommes le mercredi 29 octobre 1732, et Jean Peyric va très humblement supplier son père de bien vouloir l'émanciper, se mettant « à genoux [...], teste découverte [...], la main mize sur les Sts Évangilles [...] affirmant que lad(ite) exmancipation est faite de gré à gré, sans dol ny fraude ». En signe d'acceptation, et pour confirmer qu'il accepte la supplique, le père de Jean Peyric va accompagner son fils en une véritable re-naissance, symbolisée par une chorégraphie digne de l'adoubement d'un chevalier : « Led(it) Peyric fils s'est mit à genoux devant sond(it) père, les mains enclozes dans les siennes, et icelluy père la rellevé et luy a laché les mains en signe de sa liberté qu'il luy donne, l'exmancipant et mettant hors de sa puissance paternelle. » N'étant plus sous la férule de son père, Jean Peyric pourra, dès cet instant, gérer à sa guise les fruits et profits de ses affaires, pouvant dorénavant même dicter son testament, ce qu'il n'était autorisé à faire lors qu'il était encore sous sa domination.
Plus exceptionnellement, il arrivait qu'un père émancipe sa fille.
Ce fut pourtant la volonté de Maurice Gardier, de Clamoux, qui, le 20 mars 1793, permettait ainsi à sa fille Jeanne « tout ce que personne libre peut faire. »
Nous avons également retrouvé une autre émancipation particulière, celle d'Anthoine Jaussaud, accordée le 30 décembre 1658... par son grand-père, Maître Izac Jaussaud, du mas des Ondes.
Anthoine avait perdu son père assez tôt et, bien que sa mère, Marguerite Pagès, fut encore vivante, le patriarche régnait en souverain. Puissance du père, puissance masculine, surtout...
Article rédigé par Pascal Jaussaud, « Peyremale, Peyremalencs, Peyremalès », in Peyremale... en bref n°4, mars 2003.
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